Les catholiques qui sont anti-François, mais qui aiment Poutine
Publié le 17 Octobre 2016
Iiacomo Galeazzi et Andrea Tornielli dans leur article du dimanche 16 octobre 2016 sur Vatican Insider nous font voyager dans le monde des adversaires du pape François, où, des régionalistes nostalgiques et du ennemis du concile Vatican II, admiratifs de Ratzinger sont reliés par une désapprobation commune du pape actuel : «Il y a le chaos dans l'Église à cause du pape», selon eux.
La colle qui les maintient ensemble est leur aversion envers le pape François. Le monde des dissidents du pape va des lefebvristes qui ont décidé d’«attendre un pape traditionnel» avant de renouveler leur communion avec Rome, aux régionalistes catholiques qui comparent le pape François à son prédécesseur Ratzinger et promeuvent la campagne «Benoît est mon pape».
Puis il y a les ultraconservateurs de la Fondazione Lépante, une fondation qui vise à protéger les principes et les institutions de la civilisation chrétienne, et des sites web qui partagent des positions sédévacantistes, qui insistent sur le fait que l'écrivain catholique Antonio Socci avait raison de faire valoir que l'élection de Bergoglio est invalide, tout simplement parce que le vote a été annulé sans contrôle dans le mois de mars 2013 au conclave. En effet, l'un des cardinaux à tort placé un bulletin supplémentaire dans la boîte de scrutin. Le vote reprend immédiatement pour essuyer tous les doutes et sans aucun des cardinaux électeurs soulevant des objections. Prélats et intellectuels traditionalistes ont signé des appels ou protesté contre l'attitude pastorale ouverte du pape Argentin à l'égard de la communion pour les divorcés remariés et le dialogue avec le gouvernement chinois.
L'opposition au pape unit des gens et des groupes qui sont très différents entre eux : la critique douce est exprimée par le journal en ligne La Bussola Quotidiana et journal mensuel Il Timone, dirigé par Riccardo Cascioli. Le pape Argentin subit également les reproches sur une base quotidienne par l'ancien journaliste des affaires du Vatican de L'Espresso, Sandro Magister. Puis il y a les commentaires révélateurs et moqueurs faits par Maria Guarini dans le blog italien Chiesa e Postconcilio, et les critiques sévères formulées par des groupes ultra-traditionalistes et sédévacantistes, ceux qui croient qu'il n'est pas un pape digne depuis Pie XII.
Cette opposition au pape François qui est contenue en nombre, est très répandue sur le web. Ceux qui sont derrière cette opposition, utilisent Internet et des réunions privées entre les clercs, combinant les attaques publiques et frontales avec des stratégies plus articulés. Alessandro Gnocchi, qui écrit pour les sites Riscossa Cristiana et Unavox, est en première ligne de la critique web contre le pape : «Bergoglio livre systématiquement l'Église au monde, l'Église devient mondaine. Son pontificat est basé sur la manipulation brutale du pouvoir. Jamais la foi été si avilie.» Ce qui avilie le propos de cet homme est sa haine envers le pape.
Cette opposition mixte a identifié certains évêques et cardinaux comme points de référence. Sur son blog, Magister a mis le cardinal guinéen Robert Sarah en avant en tant que futur pape. Le cardinal Sarah est actuellement le ministre de la liturgie du pape François et il est très apprécié par les conservateurs et les traditionalistes qui le citent souvent sur leurs sites Web et publications. Parmi les étoiles polaires considérées par ces milieux, se trouve d'abord et avant tout le cardinal américain Raymond Leo Burke, patron de l'Ordre de Malte et l'évêque auxiliaire d'Astana, Athanasius Schneider. Mais au-delà des histoires amplifiées présentes sur le web, il ne semble pas y avoir d'autres schismes à l'horizon, après Mgr Marcel Lefebvre en 1988. Le sociologue Massimo Introvigne est catégorique à ce sujet : «Il y a plus de 5000 évêques catholiques dans le monde, seulement dix d'entre eux sont actifs dans leur opposition, dont beaucoup sont à la retraite, ce qui montre qu'il n’est pas important.»
Introvigne affirme que cette opposition qui «est présente à la fois sur le web et dans la vie réelle et est surestimée : il y a des dissidents qui écrivent des commentaires sur les réseaux sociaux en utilisant quatre ou cinq pseudonymes différents, pour donner l'impression qu’ils sont beaucoup». Selon le sociologue, le mouvement «ne réussit pas parce qu'il n’est pas uni. Il y a au moins trois types différents d'opposition : l'opposition politique des fondations américaines, l'opposition de Marine Le Pen et Matteo Salvini qui ne sont pas particulièrement intéressés par les questions liturgiques ou morales, souvent ils ne vont même pas à l'église, mais sur l'immigration et les critiques du pape pour sa position sur le capitalisme. Ensuite, il y a l'opposition exprimée par ceux qui se sentent nostalgique de Benoît XVI mais ne conteste pas Vatican II. Et il y a l'opposition radicale de la Fraternité Saint-Pie X ou les goûts de De Mattei et Gnocchi. Cette forme d'opposition rejette le concile et tout ce qui est venu après. Malgré le soutien de la figure de l'Église impaire, les contradictions entre les trois points de vue sont destinés à exploser et un front commun n'a aucune chance de durer.»
Introvigne a souligné un trait surprenant que beaucoup de ces cercles partagent : «C’est l'idéalisation mythique de Russie à travers le président Vladimir Poutine, qui est présenté comme un "bon" chef de file en contraste avec le "mauvais" chef, le pape, en raison de sa position sur les homosexuels, les musulmans et les immigrés. Des fondations russes qui ont des liens étroits avec Poutine pour coopérer avec l'opposition anti-François.»
Le pape François se retrouve face à une opposition minoritaire et malveillante, ne désirant qu’un retour au passé idéalisé et qui se fausse la réalité, tout en admirant le dictateur Vladimir Poutine. Il est grand temps que le pape mette de l’ordre à la maison, même si cela fait partir ces nostalgiques de Benoît XVI ou d’une vision de la Tradition limitée seulement au passé.
Merci !