À Lourdes, les évêques débattent de la formation des prêtres

Publié le 6 Novembre 2017

Bruno Bouvet et Gauthier Vaillant, envoyés spéciaux à Lourdes (Hautes-Pyrénées), nous montre dans leur article pour la-Croix.com ce dimanche 5 novembre 2017 que l’avenir des séminaires en France a occupé le début des discussions des évêques, réunis à Lourdes depuis vendredi pour leur Assemblée plénière d’automne. De manière générale, une certaine inquiétude transparaissait dans les quelques interventions épiscopales qui ont suivi la présentation du texte «Le don de la vocation presbytérale». Au premier chef, comment concilier la dimension intellectuelle des études, particulièrement la philosophie, avec le nouvel objectif de former des «disciples missionnaires» ?

 

Ils doivent en effet adapter au contexte français les nouvelles directives sur la formation des futurs prêtres, publiées en décembre 2016. Mgr Jorge Carlos Patron Wong, le secrétaire de la Congrégation pour le clergé, chargé des séminaires, qui a invité les évêques français à consacrer leurs «meilleurs prêtres» à la formation des séminaristes, n’est pas ignorant du contexte européen pour la prêtrise, mais pour lui : «Si des formateurs s’inquiètent, c’est parce qu’ils ne sont pas eux-mêmes de bons disciples missionnaires. Mais si un prêtre n’est pas formé pour être un bon pasteur, toutes ses connaissances intellectuelles ne lui serviront à rien. C’est ce que dénonce le pape François quand il parle de mondanité spirituelle. Cette nouvelle vision est à son image : c’est un père, un grand-père, pas un intellectuel.»

 

Les évêques vont désormais devoir s’atteler à la traduction des directives de la Ratio fundamentalis dans le contexte français. En effet, liberté est laissée aux conférences épiscopales de rédiger une Ratio nationalis, dont la dernière version date de 1985. Ce travail, associant directeurs de séminaires, formateurs, supérieurs de congrégation et évêques volontaires, devrait être publié d’ici à deux ans. Mais comme le note le cardinal André-Vingt-Trois cette Ratio nationalis doit aboutir à un développement des objectifs du disciple et du pasteur, tout en se gardant d’une sorte de normativité universelle ou même nationale des moyens, car l’Église se trouve dans une situation de pénurie telle, qu’à la limite il n’y aura plus de séminaires. «Nous ferons avec nos moyens, sans céder au défaitisme», lâche un évêque expérimenté, rejoignant le souci de réalisme de l’archevêque de Paris.

 

C’est que les évêques français, qui auront consacré à la «Ratio» pas moins de quatre séances de leur Assemblée plénière d’automne, connaissent bien l’état des forces et les perspectives d’avenir. «En trente ans, la situation a changé», résume Mgr Jérôme Beau, évêque auxiliaire de Paris et président de la commission épiscopale pour les ministres ordonnés et les laïcs en mission ecclésiale (Cemoleme). «Depuis trente ans, de grandes évolutions sont intervenues : par exemple les propédeutiques (année de réflexion préalable à l’entrée au séminaire) sont de plus en plus nombreuses et, de plus en plus souvent, des séminaristes se préparent à intégrer des diocèses où les prêtres en activité se raréfient.»

 

Mais l’urgence arrive car un point statistique, particulièrement éclairant, leur a été présenté vendredi par le père Jean-Luc Garin, supérieur du séminaire de Lille et responsable du Conseil national des grands séminaires. Chiffre marquant, le nombre de séminaristes en France a chuté de 30 % en seize ans, passant de 976 en 2000 à 662 en 2016. Parmi les 32 séminaires et maisons de formation, celle de la communauté Saint-Martin rassemble, à elle seule, un séminariste sur six. Quant aux séminaristes diocésains, la moitié d’entre eux sont regroupés dans cinq séminaires (Fréjus – Toulon, Toulouse, Issy-les-Moulineaux, Rennes et Paris). Les évêques le savent : la question de la fermeture, à terme, de certains séminaires, est clairement posée.

 

Les solutions concrètes se posent pour faire à la crise des vocations, et il faut trouver des solutions concrètes que certains pensent trouver dans les prêtres mariés comme en Amazonie ou les diaconesses. Les séminaires se réduisent, les prêtres manquent et il est grand temps de se poser la question de la formation des prêtres qui sortent souvent des séminaires sans vraiment connaître le monde dans lequel ils vivent et mettant en avant un dogmatisme peu adaptée à la vie de leurs paroissiens.

 

Comme le montre l’article du lundi 6 octobre de Gauthier Vaillant (à Lourdes) sur la-Croix.com, cette assemblée plénière a décidé d’inviter un pasteur évangélique : «À Lourdes, un pasteur évangélique parle aux évêques». Dimanche 5 novembre, à Lourdes, le pasteur Étienne Lhermenault, président du Conseil national des évangéliques de France, s’est brièvement adressé aux évêques français réunis en Assemblée plénière. C’est la première fois qu’un représentant de cette instance était invité dans l’hémicycle Sainte Bernadette.

 

«Face à l’immense désespérance du monde, nos Églises ont le devoir de se tenir sur la brèche.» C’est le président du Conseil national des évangéliques de France (Cnef), le pasteur Étienne Lhermenault qui a lancé, dimanche 5 novembre à Lourdes (Hautes-Pyrénées), ces mots aux évêques de France. Cette invitation inédite était «un signe de respect et de fraternité», s’est félicité le pasteur à la tribune de l’hémicycle Sainte-Bernadette, «qui souligne la richesse des dialogues que catholiques et évangéliques entretiennent depuis 20 ans». Avant même la création du Cnef en 2010, donc, a-t-il remarqué. Plus concrètement, les premiers jalons en vue de cette invitation ont été posés il y a deux ans, avec Mgr Vincent Jordy, évêque de Saint-Claude (Jura), dans le cadre des travaux du Conseil d’Églises chrétiennes en France (CECEF).

 

Devant les évêques, Étienne Lhermenault n’a pas voulu se faire la voix d’un œcuménisme angélique. «Il reste entre nous des désaccords sérieux, sur les sacrements, les ministères et l’Église, a rappelé le président du Cnef. Mais nous avons en commun de confesser le Christ crucifié, mort et ressuscité, et la mission d’aller partout par le monde faire des disciples.» Il n’a rien caché non plus de la «grande frilosité de certaines unions d’Églises membres du Cnef, à l’endroit de tout dialogue avec les catholiques». Mais en la matière, a-t-il pointé, «la base est souvent en avance sur les institutions».

 

Comment expliquer que le dialogue entre catholiques et évangéliques ait progressé ces dernières années, au point de rendre possible la présence de l’un d’eux ce soir-là à Lourdes ? «Si je comprends bien, le peuple de votre Église est moins nombreux, mais plus confessant», a lancé Étienne Lhermenault aux évêques, donnant en creux un élément de réponse. «La sécularisation, la fin de la chrétienté, entraînent un renouvellement de l’identité catholique, et donc une envie renouvelée de proposer la foi», explique le père Emmanuel Gougaud, directeur du service national pour l’unité des chrétiens, au sein de la Conférence des évêques de France. «Une telle motivation ne peut pas ne pas plaire aux évangéliques.»

 

«Nous ressentons aussi une proximité avec une grande partie des catholiques sur des sujets de société, comme la famille ou la bioéthique», complète le président du Cnef. Une manière de dire que catholiques et évangéliques pourraient, un jour, passer du dialogue à la collaboration ? «Il faudra s’entendre, à l’avenir, sur la manière dont nous pouvons agir ensemble pour être une présence chrétienne dans le monde», temporise le pasteur. «Pour l’instant, nous en sommes encore au stade de l’interpellation mutuelle.»

 

Mais ces relations sont-elles bonnes pour l’Église quand on sait que les évangéliques sont beaucoup plus vigilants sur la laïcité à la française, la voyant comme une façon de rejeter les religions de la vie sociale. Le Conseil national des évangéliques de France (Cnef) s’est aussi retiré du grand rassemblement «Protestants en fête», qui a lieu du vendredi 27 au dimanche 29 octobre, en raison de la tenue d’un culte «inclusif» pour les personnes homosexuelles. Le choix des alliés de l’Église est à revoir.

 

Merci !

Rédigé par paroissiens-progressistes

Publié dans #Actualités de l'Eglise, #Sacerdoce

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article