Le pape s'excuse auprès d'une femme défigurée par son mari avec de l'acide
Publié le 27 Novembre 2018
Vatican Insider nous montre dans son article du lundi 26 novembre 2018 montre qu’une femme qui, à Salerno au printemps dernier, a été défigurée par son mari avec de l'acide, a annoncé aujourd'hui une lettre que le pape François lui avait adressée le 11 juin. Son nom, Filomena Lamberti, l’a lue lors de la diffusion de l’émission réalisée par la Rai Uno "A Sua Immagine", consacrée à la "Journée mondiale contre la violence à l’égard des femmes" avec la participation de la CEI (la Conférence épiscopale italienne). «Je vous présente mes excuses et vous demande pardon, en prenant sur moi le poids d’une humanité qui ne sait pas demander pardon à qui est, dans l’indifférence générale, offensé, piétiné et marginalisé au quotidien.», a écrit le pape dans sa lettre.
«Ce ne sont pas des mots écrits au hasard, mais à la première personne par le pape François. C’est une lettre que je garde jalousement et qui me donne la force de continuer», a expliqué Filomena Lamberti, estimant toutefois qu’une seule journée contre les violences faites aux femmes «ne suffit pas» comme le montre Nicolas Senèze pour la-Croix.com (https://www.la-croix.com/Religion/Catholicisme/Pape/Le-pape-demande-pardon-femme-victime-violence-conjugale-2018-11-26-1200985610?from_univers=lacroix). «La femme doit être défendue, protégée et toujours encouragée pour pouvoir réagir et ne pas souffrir», explique celle dont le mari n’a été condamné qu’à 18 mois de prison pour «maltraitance familiale», ne restant que 15 mois en prison, sans se repentir, et affirmant même être prêt à recommencer.
Malgré ce beau discours l’Église n’a pas évolué dans ses positions au niveau des femmes, puisque l’article de Georges Scherrer pour kath.ch, traduit par Raphaël Zbinden dans cath.ch (https://www.cath.ch/newsf/femmes-catholiques-en-revolte-leglise-ne-doit-pas-les-laisser-tomber/), nous montre que le 19 novembre 2018, six féministes catholiques suisses alémaniques (Cécile Bühlmann, ancienne conseillère nationale des Verts (LU), Anne-Marie Holenstein, ancienne directrice de l’Action de Carême, Monika Stocker, ancienne conseillère nationale et conseillère municipale de Zurich, Doris Strahm, et Regula Strobel, théologiennes féministes, ainsi que Ruth-Gaby Vermont ancienne conseillère nationale et membre du Conseil de l’Europe) bien connues ont annoncé leur départ de l’Église, en raison du comportement prétendument anti-féministe du clergé. La théologienne argovienne Jacqueline Straub, récemment classée par la BBC parmi les femmes les plus influentes du monde, qui a depuis longtemps publiquement déclaré son intention de devenir un jour prêtre, demande que l’Église en Suisse ne tombe pas entre les mains de l’aile conservatrice, les écoute et ne les laisse pas tomber.
Elle a le sentiment que le synode n’a pas accordé une attention suffisante aux préoccupations des femmes. Le groupe de travail germanophone du synode a certes plaidé en faveur de l’abolition du célibat obligatoire et de l’amélioration de la situation des femmes, non seulement en ce qui concerne les possibilités de carrière dans l’Église, mais aussi dans les ministères spirituels. Mais, concernant ce domaine, Jacqueline Straub considère qu’il n’y a “tout simplement pas assez, voire rien de concret dans le document final”.
“Je sais que mes efforts ne sont pas vains. Je ne fais pas ça uniquement pour moi, mais pour toutes ces femmes qui, pour diverses raisons, ne peuvent pas faire entendre leur voix. Souvent, ce sont des femmes qui sont employées dans l’église et craignent d’être licenciées si elles s’expriment publiquement sur certains sujets. En Suisse, le risque est moins présent. Mais en Allemagne, je connais des femmes qui ont été mises devant ce choix : “Soit vous la fermez, soit vous perdez votre emploi”.”
Maurice Page dans son article sur cath.ch du lundi 19 novembre (https://www.cath.ch/newsf/six-feministes-suisses-alemaniques-quittent-leglise-catholique/) nous montre quelles sont les raisons qui ont poussé ces six féministes catholiques suisses alémaniques à quitter l’Eglise en raison du comportement anti-féministe persistant des clercs et de l’enseignement ecclésial. La goutte qui a fait déborder le vase a été la comparaison de l’avortement avec le recours à des tueurs à gages faite par le pape François le 10 octobre. Pour les signataires, cette déclaration choquante n’est pas seulement un lapsus verbal, mais montre une attitude fondamentale de l’Église : les femmes sont criminalisées, tandis que les hommes impliqués dans la grossesse ne sont pas rendus responsables. Cette déclaration du pape a provoqué une indignation internationale bien au-delà des cercles féministes. Une pétition en ce sens a également été soutenue, par exemple, par la Ligue suisse de femmes catholiques.
Dans les communautés locales, les femmes vivent certainement une “Église différente”. Une Église dans laquelle les valeurs de la justice entre les sexes sont présentes. Mais “en tant que membres de l’Eglise catholique-romaine, nous ne pouvons plus nous tromper en prétendant que nous n’avons rien à voir avec le magistère romain et avec l’Église cléricale” note le communiqué. Les femmes affirment qu’en tant que féministes, elles ne veulent plus appartenir à un tel système qui met leur crédibilité en jeu. Les impôts ecclésiastiques qu’elles payent à ce jour seront versés directement à des projets sociaux à l’intérieur ou à l’extérieur de l’Église. Elles expliquent ne plus vouloir soutenir ainsi “l’appareil du pouvoir catholique-romain avec sa théologie patriarcale”.
Comme le montre le site Le déni, Enquête sur l'Église et l'égalité des sexes (http://ledeni.net/de-quoi-parle-le-livre/) on peut difficilement s’attendre à mieux dans une institution où la vision est celle que les femmes secondent toujours les hommes dans la société comme dans l’Église. Il y a bien un sexe du service. Cette idée est profondément intériorisée par les hommes comme par les femmes; ce qui permet le maintien de la domination masculine. Cette infériorisation des femmes trouve sa source dans le modèle marial. Il est attendu d’une femme qu’elle soit humble et soumise, discrète et modeste. Au modèle de Marie servante, s’ajoute celui de la Vierge Mère.
L’assignation aux rôles du service et de la maternité empêche les femmes de pouvoir déployer leurs autres capacités. L’attention se focalise sur leur corps qui séduit et porte les enfants. De ce fait, elles ne sont pas considérées comme des sujet de raison à part égale avec les hommes. Le déni de l’intelligence des femmes se traduit concrètement par des inégalités persistantes : éducation, choix d’études et de métiers, prise en charge du travail parental et domestique, évolution de carrière, écart de rénumérations. L’insistance sur la différence sexuée des femmes est une clé de compréhension de l’inégalité entre les sexes. Le discours de Jean-Paul II aux membres de la Délégation du Saint-Siège lors de la IVème Conférence Mondiale sur la Femme 29 août 1995 va dans ce sens.
Il est grand temps de dégager l’Église de cette vision limitée. Jésus n’a pas appelé que des hommes à le suivre, mais également des femmes et ces dernières ont eu des rôles importants dans les premières communautés chrétiennes où elles avaient des ministères important (diaconesses, lectrices, anciennes, veuves et vierges). Comme le montre Élisabeth Dufourcq dans son article Une nouvelle relation instaurée par Jésus dans Jésus, une encyclopédie contemporaine aux éditions Bayard en 2017 les femmes ont mieux compris le message de Jésus, car Jésus met en avant que leur service devrait être imité par les hommes, car le Royaume des cieux sera à l’image de leur travail. Philippe Lefebvre dans l’article Jésus et les femmes pour Jésus, l’encyclopédie aux éditions Albin Michel en 2017 pousse plus loin en montrant que les disciples masculin du Christ ne méritent le qualificatif de disciples que grâce aux femmes qui les accompagnent et les aident.
Les femmes ont donc une part importante dans le travail du Royaume de Dieu et les hommes ont besoin d’elles pour l’établir. Pourquoi l'Eglise s’oppose-t-elle à ses droits les plus élémentaires, celui de disposer librement de son corps, de penser librement et de défendre ses droits ? L’Église oublie-t-elle que selon son propos hommes et femmes ont été créés à l’image de Dieu et devraient donc avoir une part égale dans le Royaume de Dieu mais aussi dans la société actuelle. Les violences tant verbales que physiques contre les femmes sont une offense faite à Dieu qui est aussi une mère, et on ne les réglera que si toutes les institutions effacent les inégalités entre hommes et femmes profondément ancrée dans les esprits et aussi dans les actes.
Merci !