L'Argentine légalise enfin l'IVG, le reste de l'Amérique latine à la traîne

Publié le 30 Décembre 2020

L'Argentine légalise enfin l'IVG, le reste de l'Amérique latine à la traîne

Kadiatou Sakho dans Libération.fr nous montre ce mercredi 30 décembre 2020 que l’Argentine devient le quatrième pays du continent latino-américain à autoriser l’avortement sans restrictions : le Sénat vient d'approuver le projet de loi légalisant son accès, après un vote des sénateurs en faveur du texte après plus de douze heures de débat, a annoncé la présidente du Sénat, Cristina Kirchner. Déjà approuvé par les députés le 11 décembre, le texte, qui autorise l’interruption volontaire de grossesse jusqu’à 14 semaines de grossesse, a été adopté avec 38 voix pour, 29 contre et une abstention, tandis que des milliers de partisans du «oui» ont manifesté leur joie devant le Sénat à l’issue du vote. «Après tant de tentatives et des années de lutte qui ont fait couler du sang et nous ont coûté des vies, aujourd’hui nous avons enfin fait l’Histoire. Aujourd’hui, nous laissons un monde meilleur pour nos enfants», a lancé à Sandra Lujan, une psychologue de 41 ans, qui participait à la veillée organisée par les partisans de l’avortement reconnaissables à leur couleur verte (https://www.20minutes.fr/monde/2941987-20201230-argentine-congres-legalise-avortement).

 

Malgré la pandémie, plusieurs milliers d’Argentins s’étaient rassemblés à proximité du Parlement pour exprimer leur soutien ou leur rejet du texte, avec force banderoles, musique et des écrans géants transmettant les débats en direct. «Sénateurs, c’est maintenant !» pouvait-on lire du côté des pro-IVG. «Nous sauvons deux vies», proclamaient les anti-IVG. Les pro-IVG, ralliés autour de la couleur verte, ont fait une intense campagne sur les réseaux sociaux. En particulier la Campagne pour un avortement légal, sûr et gratuit, qui regroupe plus de 300 organisations féministes, déjà très mobilisées en 2018. Selon le gouvernement, entre 370 000 et 520 000 avortements clandestins sont pratiqués chaque année dans le pays de 44 millions d’habitants, où 38 000 femmes sont hospitalisées pour complications lors d’avortements clandestins (https://www.20minutes.fr/monde/2941987-20201230-argentine-congres-legalise-avortement).

 

Les années de mobilisation féministe à travers le pays ont enfin fini par payer. En Argentine, le projet de loi pour la légalisation de l’avortement approuvé par les députés le 11 décembre a finalement été adopté dans la nuit de mardi à mercredi par le Sénat, bastion conservateur. Le texte a été approuvé par 38 voix contre 29 et une abstention. En 2018, le Sénat avait déjà rejeté un texte similaire. Comme celui proposé cette fois par le président de centre gauche Alberto Fernández, au pouvoir depuis fin 2018, qui avait promis pendant sa campagne de soumettre à nouveau la légalisation de l’IVG aux parlementaires, en mettant en avant qu’il était «catholique, mais je dois légiférer pour tous, c’est un sujet de santé publique très sérieux», et son texte visait à autoriser les IVG durant les quatorze premières semaines de grossesse. Jusqu’à présent, l’avortement en Argentine n’était permis qu’en cas de viol ou de danger pour la mère, d’après une loi de 1921. Et malgré le fait que le pape argentin François, jusque-là silencieux sur la question, a publié mardi un message sur Twitter dans lequel il souligne que «le Fils de Dieu est né rejeté pour nous dire que toute personne rejetée est un enfant de Dieu. Il est venu au monde comme un enfant vient au monde, faible et fragile, afin que nous puissions accepter nos faiblesses avec tendresse». Bien que ne faisant pas référence explicitement au débat, le message a été interprété par la presse argentine comme un rejet de la loi (https://www.20minutes.fr/monde/2941987-20201230-argentine-congres-legalise-avortement).

 

Cette pratique reste encore tabou en Argentine où l’on compte près de deux millions d’avortements illégaux chaque année. Une situation commune dans nombre de pays du continent, empreint de catholicisme et très divisé sur cette question. L’avortement n’était totalement autorisé jusqu’à ce jour que dans trois pays latinos : Cuba depuis 1965, le Guyana et l’Uruguay depuis 2012, jusqu’à douze semaines de grossesse. A contrario, l’IVG est strictement interdite au Honduras, au Nicaragua, en République dominicaine, au Salvador et au Suriname, même en cas de viol ou de danger pour la mère. Dans certains pays de la région comme le Mexique, les règles en matière d’avortement diffèrent d’un endroit à un autre. Au sein de cet État fédéral d’Amérique centrale, chacune de 32 entités fédératives qui le composent dispose d’une législation propre à ce sujet. L’avortement n’est légal que dans la capitale, Mexico, depuis 2007 et dans l’État d’Oaxaca depuis 2019, jusqu’à douze semaines de grossesse. Dans le reste du pays, il n’est permis par la loi qu’en cas de viol. Certains États mexicains l’autorisent aussi dans deux autres circonstances : quand la vie de la femme enceinte est en danger, et en cas de malformation du fœtus.

 

Même dans les cadres autorisés par la loi, certains praticiens refuseraient de procéder aux avortements, déplorent les défenseurs du droit à l’IVG comme l’ONG Amnesty international. Selon le ministère de la Santé chilien, la moitié des obstétriciens du Chili s’opposaient en 2019 à pratiquer des IVG , en raison de leurs convictions personnelles. Le pays a assoupli l’accès à l’IVG en 2017, l’autorisant seulement dans trois situations : risque pour la vie de la femme, non-viabilité du fœtus et viol. Les interdictions, ainsi que les refus de pratiquer ces actes par certains professionnels de santé, ont des conséquences médicales et sociales: de nombreuses femmes font le choix d’avortements pratiqués clandestinement. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), trois interruptions de grossesse sur quatre sont faites illégalement en Amérique Latine, ce qui représente près de deux millions d’avortements illégaux chaque année. Ces interventions à risque peuvent provoquer des complications pour les patientes, pouvant aller dans certains cas jusqu’au décès. Ces pratiques sont passibles de peines de prison allant jusqu’à plusieurs dizaines d’années d’emprisonnement pour homicide. D’autres femmes peuvent également être condamnées pour des fausses couches, assimilées à des avortements. En 2019, la Salvadorienne Evelyn Hernandez avait ainsi été condamnée lors d’un premier procès à trente ans de prison pour avoir accouché d’un bébé mort-né, avant d’être finalement acquittée.

 

C'est une victoire pour celles et ceux qui, depuis des années, mènent ce combat contre l'influence de l'Église en Argentine, et cela pourrait inspirer beaucoup d’autres pays d’Amérique latine et des Caraïbes. La marée verte ne fait que commencer.

 

Merci !

Rédigé par paroissiens-progressistes

Publié dans #Actualités

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