Publié le 30 Avril 2017
Nous avons 39 ans aujourd’hui. Dans le champ de ruine que nous a laissé le gouvernement social libéral de François Hollande, nous avons le choix avec la mondialisation heureuse de Macron qui laisse de côté ceux qui en sont les perdants et le populisme de Marine Le Pen qui vend du rêve pour gagner à lui ces perdants de la mondialisation.
Nous ne nous y retrouvons pas. Le pape François non plus comme le montre hier sa conférence de presse dans l’avion qui le ramenait en France : «Sur la France, a-t-il répondu, je vous le dis sincèrement : je ne saisis pas bien la politique intérieure française.» Et «Des deux candidats, je ne connais pas l’histoire. Je sais que l’un représente la droite “forte” mais l’autre, je ne sais pas qui il est, alors je ne peux pas donner une opinion.»
Il n’est plus le temps de regarder ce qui est mieux pour nous, car le choix est mauvais. Au lieu de proposer la mondialisation heureuse, il faudrait permettre aux travailleurs de faire de l'autogestion ou même de permettre le contrôle de la production par les ouvriers, ainsi ils pourraient maintenir la production industrielle en temps de crise économique grave. Les agriculteurs pourraient créer des unités de production collective et aussi des coopératives afin d'assurer les salaires et les emplois. Dans les quartiers pauvres, il faut stimuler la lutte pour l'amélioration des conditions de logement. Ainsi les travailleurs seront libérés d’une économie de plus en plus centrée autour de la finance. Les capitaux ne bénéficient plus à l’économie réelle aujourd’hui mais au marché.
Et la hiérarchie de l’Église dans tout cela est peu audible, car elle aussi est peu motivée dans ce choix politique puisqu’elle doit choisir entre le libéralisme économique et la populisme. Pourtant, Michael Moore dans son film documentaire Capitalism : A Love Story en 2009 nous le montre demander au père Dick Preston, de Flint au Michigan (États-Unis) si le capitalisme est un péché, la réponse de celui-ci est sans ambages : «Oui, pour moi pour beaucoup d’autres à mon époque, le capitalisme est un mal, c’est le contraire de tout ce qui est bon, c’est le contraire du bien commun, c’est contraire à la compassion, ainsi que prône toutes les religions. Le capitalisme, c’est précisément ce que tous les livres saints, le notre en particulier désigne comme injuste et que Dieu viendra éradiquer d’une façon ou d’une autre». Il conclue par «Le capitalisme est mauvais, il devrait être éliminé.»
Puis, il va voir le père Peter Dougherty qui lui dit que «c’est immoral, c’est obscène, c’est scandaleux.» Pour lui, «c’est le mal absolu, le mal absolu». Enfin, il va voir l’archevêque Thomas Gumbleton qui n’est pas plus tendre avec le capitalisme : «Le système ne semble pas apporter le bien être à tout le monde, et c’est ce qui le rend par sa nature intrinsèque contraire à la parole de Jésus qui disait : «Heureux vous les pauvres, malheur à vous les riches». C’est dans l’Évangile selon saint Luc.» Puis Michael Moore revient au père Dougherty lui demandant pourquoi nous avons toléré ce système aussi longtemps, sa réponse est très intéressante : «Le système a en son sein, ce qu’on appelle une propagande. J’ai une crainte mêlée de respect pour la propagande, c’est la capacité à convaincre les gens qui sont victimes d’un système de soutenir ce même système et de le considérer comme un bien.»
Michael Moore donne une vision du catholicisme qui est aussi la notre : «Quand j’étais petit, je voulais être prêtre, ce n’était pas à cause des jolies robes, des chevaliers de Colomb, ni même des nonnes qui étaient si gentilles avec moi, c’était à cause de ces prêtres qui avaient marché depuis Selma pour manifester contre la guerre, ceux qui vouaient leur vie aux pauvres. Ils m’avaient clairement expliqué ce qu’avait dit Jésus : que les premiers seraient les derniers, et que les derniers seraient les premiers, que les riches auraient beaucoup de mal à entrer au Paradis, qu’on serait jugé sur notre façon de traiter les plus démunis d’entre nous et qu’il n’y avait personne de plus important pour Dieu que les pauvres. Mais depuis, il semble que Jésus a été détourné par de nombreuses personnes qui croient que le Fils de Dieu a été envoyé ici pour faire le Paradis des nantis.»
Ne soyons pas naïf, choisir le néolibéralisme économique soutenant l'ouverture du marché des capitaux qui est un facteur de risque, les politiques d'austérité et de privatisations qui mènent à la réduction du rôle de l’État providence et creuse les inégalités pour contrer le populisme qui n’est qu’un capitalisme fermé qui entraîne l’abolition des syndicats, le gel des salaires et la baisse de la masse salariale, la hausse des impôts sur le revenu, la baisse consommation comme dans une économie dérégulée, c’est comme contrer un pistolet avec un couteau.
Jésus a annoncé le Royaume de Dieu qui amènera la libération et le bien-être des gens impliquant le jugement de Dieu pour ceux qui opprimaient le peuple. Cette annonce menait à une transformation historique, qui serait qualifié de «révolution» aujourd’hui. L’ordre ancien devait être remplacé par un nouvel ordre social-politique, c'est-à-dire le «royaume de Dieu», et Jésus invitait le peuple à y «entrer». Jésus ne s'adressait pas simplement aux individus mais appelait une réponse sociale collective. Jésus appelait à des communautés renouvelées d'alliance locales conçues dans des termes familiaux non patriarcaux. Ses disciples ont ensuite concentré leurs activités sur la revitalisation de la vie communautaire locale. Ce choix est plus intéressant que celui qu’on nous propose aujourd’hui.
Casimiro Alexandre et Raphaël