La communauté des Béatitudes confrontée à son passé
Publié le 27 Octobre 2023
Christophe Henning nous montre dans la-croix.com dans son article du jeudi 26 octobre 2023 qu’au cours de leur assemblée générale qui s’ouvre vendredi 27 octobre, les membres des Béatitudes vont désigner leurs nouveaux responsables. L’occasion de marquer ses 50 années d’existence, mais aussi de reprendre une relecture d’un demi-siècle mouvementé et marqué par des manquements et déviances graves. Foyer d’étudiants, maison d’édition, sessions en famille… les propositions spirituelles de la communauté des Béatitudes sont toujours aussi nombreuses. Un réel dynamisme alors même qu’elle se trouve toujours confrontée à un lourd passif qui n’est toujours pas apuré. Il faut dire que la Communauté fait l’objet de demandes d’enquêtes émanant des diocèses d’Albi, Toulouse, Saint-Dié et Fréjus-Toulon. (https://www.golias-editions.fr/2023/10/26/beatitudes-quand-letau-se-resserre/).
Cet idéal de mode de vie catholique trouve ses origines en 1973. À l’époque, deux couples fondent la "Communauté du Lion de Judas et de l'Agneau immolé". Ils s'installent à Cordes-sur-Ciel, dans le Tarn. L'objectif est de vivre à l'image des premières communautés chrétiennes, comme l'explique notre confrère de "La vie" dans une longue enquête publiée le 13 janvier 2023. La vie est collective, les biens sont mis en commun, la prière est permanente. Dans les années 80, la communauté développe ces fameuses "maisons" dirigées par des bergers. Elle s'installe dans d'anciens couvents ou monastères désertés. Une cohabitation s'organise entre religieux et laïcs, dont des familles. Tous les membres prononcent des vœux de chasteté, de pauvreté et d'obéissance. En 1991, la communauté change de nom et devient la "Communauté des Béatitudes". Au début des années 2000, ils sont 1500 membres, répartis dans une trentaine de pays. Il en resterait 700 aujourd'hui (https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/tarn/ma-vie-a-ete-fracassee-par-ce-sejour-aux-beatitudes-le-recit-glacant-d-une-ancienne-membre-de-cette-communaute-catholique-du-tarn-2861747.html).
L’avenir de la communauté devrait passer par la relecture du passé, marqué par des agressions sexuelles et des défauts de gouvernance.
Dans la foulée, un collectif de personnes victimes de la communauté des Béatitudes a été fondé le 9 octobre. Ce "Collectif Accompagnant des Victimes des Béatitudes" (CAV) a été fondée par une ancienne infirmière Myriam Remy qui a fait partie - avec sa famille - de la communauté des Béatitudes de Saint Luc, installée dans le village de Cuq (Tarn). Elle sort brisée de cette expérience, après avoir subi une emprise psychologique et perdu toutes ses économies. Après quinze jours d'existence, il regroupe une dizaine de membres, dont sa fille qui l'accompagne dans son combat. "L'objectif", martèle-t-elle, c'est de "recueillir la parole des victimes, de leur permettre de se regrouper, de s'entre-aider. Mais aussi de demander réparation" (https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/tarn/ma-vie-a-ete-fracassee-par-ce-sejour-aux-beatitudes-le-recit-glacant-d-une-ancienne-membre-de-cette-communaute-catholique-du-tarn-2861747.html).
Par le passé, plusieurs de ses membres ont été condamnés, notamment pour "viol sur mineur" ou "agressions sexuelles". Et de nouvelles affaires sortent régulièrement dans la presse (https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/haute-garonne/abus-sexuels-au-sein-des-beatitudes-la-communaute-occulte-les-episodes-douloureux-passes-pour-ses-50-ans-2826806.html), notamment des faits d’emprise et d’abus sexuels au sein d’un internat, à Autrey (Vosges), aujourd’hui fermé, dépendant des Béatitudes, et qui n’est que la pointe émergée de l’iceberg, où au moins dix élèves du cours Agnès de Langeac auraient été victimes d’abus, des faits remontant aux années 1990, ce qui a mené à une enquête préliminaire canonique avait été ouverte par l’archevêque de Toulouse (diocèse où se trouve le siège de la Communauté des Béatitudes, à Blagnac), avant que le Tribunal pénal canonique national ne soit désigné pour poursuivre la procédure (https://www.golias-editions.fr/2023/10/26/beatitudes-quand-letau-se-resserre/). Dès l’an 2000, de premières révélations mettent en cause plusieurs membres, à commencer par le fondateur et ses proches collaborateurs. «Nous avons appris les faits par l’article. Tout ce que nous souhaitons, c’est que la lumière soit faite». Des membres reçus par le pape, croit de son côté un délégué. Si la communauté se débat avec ces affaires depuis quinze ans, des membres soulignent les efforts de refondation des dernières années.
Pourtant pour ses 50 ans, comme le montre france3-regions.francetvinfo.fr (https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/haute-garonne/abus-sexuels-au-sein-des-beatitudes-la-communaute-occulte-les-episodes-douloureux-passes-pour-ses-50-ans-2826806.html) la Communauté des Béatitudes, a publié un livre qui retrace son histoire. Dans un contexte de soupçons d’abus sexuel, son contenu a mis en lumière l’absence de positionnement fort et concret en faveur des victimes. En ouvrant les pages de l’ouvrage “Hier au jourd’hui”, on peut lire quelques mentions de ces événements : “50 ans, c’est beaucoup de lumière, mais aussi des zones d’ombre. Les chemins empruntés comportent malheureusement aussi des détours qu’on aurait préféré éviter. Il y a des sommets et des vallées, des passages étroits et de grands espaces, des hauts et des bas”. C’est assez peu. Pas un mot des abus commis en son sein, notamment par le père Georges Silva, alias Marie-Bernard d’Alès, reconnu coupable dans un procès canonique en 2012 «d’abus sexuel continu sans violence». Pas un mot non plus de son fondateur Gérard Croissant, dit Frère Éphraïm, soupçonné d’abus et de manipulation mentale, ou du frère Pierre-Étienne Albert, condamné pour avoir agressé sexuellement une soixantaine d’enfants en vingt ans (https://www.golias-editions.fr/2023/10/26/beatitudes-quand-letau-se-resserre/). Certains regrettent aussi l’absence de la communauté à la CRR, contrairement à la quasi-totalité des communautés, notamment les plus de 300 du Coref, intégrées d’office.
Cependant, comme le montre Golias (https://www.golias-editions.fr/2023/10/26/beatitudes-quand-letau-se-resserre/) les diocèses diocèses d’Albi, Toulouse, Saint-Dié et Fréjus-Toulon ont sollicité le Tribunal pénal canonique national afin qu’il «poursuive l’enquête préliminaire concernant différentes affaires mettant en cause certains membres de la communauté des Béatitudes». Créé à la suite du rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase), installé par la Conférence des évêques de France le 5 décembre 2022, le Tribunal pénal canonique national dispose de juges plus aguerris, d’un champ d’investigation plus large et d’une reconnaissance étendue. L’optimisme est de mise chez les victimes, car "Le Tribunal pénal canonique national a des délais de prescription qui sont bien plus longs que la justice traditionnelle. Cela nous donne de l'espoir" (https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/tarn/ma-vie-a-ete-fracassee-par-ce-sejour-aux-beatitudes-le-recit-glacant-d-une-ancienne-membre-de-cette-communaute-catholique-du-tarn-2861747.html).
Au niveau national, la communauté des Béatitudes semble prête à aider le Tribunal pénal canonique national. Mais d’après les informations de Golias (https://www.golias-editions.fr/2023/10/26/beatitudes-quand-letau-se-resserre/), l’archevêque de Toulouse, Guy de Kerimel, très remonté, s’apprêterait à demander au Vatican une seconde visite canonique pour inspecter à nouveau la Communauté des Béatitudes.
Merci !