Né le 30 avril 1978, mon enfance et mon adolescence ont vu trois papes : Paul VI (entre avril et août) et Jean-Paul 1er (en août) qui ne dura que 33 jours en 1978, dont je n’ai pas de souvenir, Jean-Paul II qui sous ses atours modernes n’avait que peu d’attrait pour un jeune des années 1980-1990 avec sa pensée réactionnaire, et finalement Benoît XVI qui au moment où j’étais adulte s’est avéré décevant, mal entouré et n’a jamais su dépasser la pensée réactionnaire de son prédécesseur. J’ai eu le malheur de vivre cette restauration catholique faite par Jean-Paul II et continuée par Benoît XVI pendant mon enfance, mon adolescence et au commencement de mon âge adulte. Le fait que rien ne m’attirait dans ces pontificats vient du fait que je viens des classes populaires, né de parents portugais ayant fuit la dictature salazariste au Portugal, et de tendance ouvrière (père dans le bâtiment, et mère ouvrière textile avant de nous élever en devenant un mère au foyer), ma lecture des évangiles est totalement en désaccord avec ces pontificats. Car le Jésus qu’ils donnaient était terriblement fade et sans saveur. Plutôt que d’être de droite comme beaucoup de pratiquants actuellement, la lecture des évangiles m’a fait devenir de gauche.
Et cela s’explique pour une bonne raison, le Jésus que j’ai connu dans mon enfance et adolescence, et au début de mon âge adulte, nous montre qu’il est possible de «rétablir plus d’égalité réelle entre les humains, à redistribuer les biens, à combattre la pauvreté», et de ce fait, il est «profondément révolutionnaire», non pas dans un sens strictement politique, mais dans la mesure où sa doctrine représente « l’exact contre-pied de ce que l’on nous propose généralement pour être heureux». Jésus incarne la liberté absolue devant les pouvoirs et les peurs, s’adresse à tous mais en donnant la priorité à «ceux et celles qui sont déconsidérés dans sa société», fait de la pauvreté (et non de la misère) une richesse, «car elle met l’accent sur l’essentiel», place le partage au-dessus de la propriété, refuse la violence dans les rapports humains, professe la dignité de chaque personne et prêche par l’exemple, comme le montre l’histoire de sa vie. Il opère bel et bien «un renversement des valeurs» et que, par conséquent, l’option préférentielle pour les pauvres prônée par le christianisme social est parfaitement légitime. Sa révolution est intérieure et demande le détachement «à l’égard des biens temporels, la dépossession de soi, loin de la cupidité de notre société» (https://www.ledevoir.com/opinion/chroniques/458643/jesus-est-il-de-gauche). Enfin, pour Jésus, parler du Règne de Dieu, c’était parler de la vie et de la dignité des êtres humains. C’est pourquoi sa façon de prêcher était de «guérir toutes les maladies et les souffrances du peuple» (Matthieu 4,23), c’est-à-dire de rendre vie à ceux dont l’existence était menacée. Et lorsqu’il envoya les Douze annoncer le message à leur tour, ceux-ci le firent «en chassant des démons et guérissant des malades» (Marc 6,13). Pour Jésus, la venue du Règne de Dieu n’était concevable que si l’on se préoccupait de la souffrance humaine. Cependant il ne l’a pas fait pour convertir les gens, mais parce qu’il les aimait. Tel fut le groupe «de résistance au mal» que Jésus fonda. Un mouvement d’hommes et de femmes qui se souciaient des besoins du prochain (Matthieu 25,31-46), un groupe qui agissait et luttait pour que la société devienne plus humaine et plus fraternelle (https://www.choisir.ch/religion/bible/item/3357-quelles-revoltes-politiques-jesus-a-t-il-connues). Malheureusement, c’est d’ailleurs au moment de la conversion de l’Empire que le christianisme a pivoté vers la droite : de marginal et de subversif, le message du Galiléen devenait central et normatif. L’Église «universelle» («catholique») s’est douillettement lovée dans les structures et les cadres de l’Empire romain, pour devenir une religion d’État peu portée sur la tolérance. Le christianisme, de religion de gueux, est devenu alors une religion de puissants, tout en se divisant (multiples foyers dissidents, dits «hérétiques») et en se scindant (schismes divers, en Orient en 1054, en Occident en 1517-1521), mais en restant du bon côté du manche (en gros, celui des riches et du pouvoir, exception faite de celles et ceux qui allaient chercher leur salut dans le soin apporté aux lépreux). Aujourd’hui, l’image du christianisme donne raison à la parabole du Grand Inquisiteur que Dostoïevski imagine : le Christ serait renvoyé sur la croix séance tenante (https://www.liberation.fr/debats/2020/01/08/jesus-est-il-de-droite-ou-de-gauche_1771983/). On est très loin, de Jésus qui disait à ses disciples de ne pas être comme les Romains qui gouvernaient les peuples en «seigneurs absolus» et les «opprimant sous leurs pouvoirs» (José Antonio Pagola, Jésus – Approche historique, Cerf, 2007). L’Église en soutenant les puissants s’est éloigné de l'enseignement social le plus cohérent du Nouveau Testament qui est que les chrétiens doivent soutenir les pauvres, les veuves et les orphelins (https://www.contrepoints.org/2018/03/31/313004-jesus-christ-a-t-il-ete-crucifie-pour-des-raisons-politiques).
Et ce Jésus rebelle et contestataire m’a mené vers les catholiques de gauche, bien plus exaltant que ceux de droite dans ma vision actuelle de l’Église. Contre une Église catholique jusque-là massivement portée à droite et une Église protestante embourgeoisée, ils voulaient, au nom de leur foi, s’engager dans la Cité et peser sur la politique tout en changeant le visage de leurs Églises. Décolonisation, syndicalisme, autogestion, féminisme, tiers-mondisme… : ils ont été de toutes les luttes, et souvent même à l’avant-garde de la contestation marqués par les espoirs d’ouverture de l’Église au monde, suscités par Vatican II (1962-1965) après la condamnation en 1955 de l’expérience des prêtres-ouvriers, par les luttes anticoloniales de la guerre d’Algérie (1954-1962) et le tiers-mondisme, par un socialisme antistalinien, démocratique et autogestionnaire. Beaucoup engagèrent un dialogue exigeant avec la tradition marxiste. Après le concile Vatican II, réveillant la doctrine sociale, et Mai 68 soutenu par Michel de Certeau, et des étudiants et dominicains du Saulchoir, certains furent même tentés par la révolution dans la société et dans leurs Églises comme Pierre Chaulet, ce médecin, chrétien de gauche, qui rejoignit tôt le FLN et vécut en Algérie jusqu’au début des années 1990, culminant dans les luttes de Lip et du Larzac en 1973. Leur contribution à la rénovation de la gauche socialiste pour laquelle ils ont fortement contribué au PS, au PSU, à la Cfdt créée en 1965, et se mobilisèrent magnifiquement sur les questions démocratiques et antitotalitaires lors du soutien à Solidarnosc en Pologne, puis à l’élection de François Mitterrand en 1981 fut ensuite décisive. La période de restauration sous Jean-Paul II puis Benoît XVI aurait pu sonner le glas des cathos de gauche, mais il n’en est rien, car formés comme leurs aînés dans le monde associatif, en prise avec les droits humains et la justice sociale (ATD Quart Monde, CCFD-Terre solidaire), les Marches pour le climat, le scoutisme ou les groupes de parole de leurs paroisses, les néocathos de gauche entendent bien transformer radicalement la société (Denis Pelletier, et Jean-Louis Schlegel, À la gauche du Christ : Les chrétiens de gauche en France de 1945 à nos jours, Seuil, 2012, https://esprit.presse.fr/article/jean-claude-eslin-et-jean-pierre-peyroulou/que-reste-t-il-des-chretiens-de-gauche-37252, et https://www.lavie.fr/actualite/societe/quand-la-generation-laudato-si-revivifie-le-paysage-politique-francais-71969.php). Ils sont regonflés par le message d'ouverture du pape François et ses prises de position sur l'écologie, les inégalités, les réfugiés (https://www.challenges.fr/societe/presumes-moribonds-les-cathos-de-gauche-bougent-encore_504747).
La théologie de la libération a eu également un rôle important dans mon choix d’être à gauche avec sa vision du Jésus libérateur. Fondée sur la réflexion théologique progressiste en Europe mise en valeur par le concile Vatican II, la théologie de la libération que l'on doit au Péruvien Gustavo Guttierez et au Brésilien Leonardo Boff, a échappé au pouvoir central de l’Église dans un grand esprit de renouveau, qui n’a pas concerné que l’Amérique latine. Son principe central, l’«option préférentielle pour les pauvres» proclamée lors de l’assemblée des évêques latino-américains (CELAM) de Medellin en 1968, a été élargi à tous les opprimés, indigènes, Afro-Américains, femmes… Il ne s’agit pas de faire «pour» les pauvres, mais avec eux, en s’appuyant sur les communautés ecclésiales de base, qui regroupent d’abord mais non exclusivement les chrétiens d’un quartier. Vivant le partage des responsabilités, ils élisent leur responsable, ce qui remet en question l’ordre vertical de l’institution amenant la construction d'une Eglise autogérée, partant de la base. Ce dévouement envers les pauvres a dans un premier temps enthousiasmé Rome, sous Paul VI (1963-1978), qui a désigné des prêtres progressistes dans la région. De très nombreux religieux, des prêtres, prirent fait et cause pour les classes paupérisées, n’hésitant pas à joindre des mouvements sociaux et politiques. Maints leaders populaires issus de conditions modestes, comme l’ancien président Lula au Brésil, ont été formés par les théologiens de la libération. Au Brésil, au Chili, au Pérou, en Amérique centrale, mais aussi en Argentine, ces chrétiens de la libération rejoignirent aussi les mouvements de la résistance contre les juntes militaires au pouvoir dans les années 70 et 80. Plusieurs évêques devinrent des héros populaires comme Dom Helder Camara (1909-1999), l’archevêque d’Olinda et de Recife au Brésil, et le salvadorien Oscar Romero, né en 1917, assassiné en pleine messe le 24 mars 1980 pour avoir dénoncé la répression de l’armée et l’oligarchie au pouvoir. Cette théologie, qui fut ensuite présentée comme une dangereuse révolution communiste, faisant trembler les pouvoirs, surtout lorsque ses porte-étendard avaient la force et le prestige d'un Camara, a rencontré l’opposition du tandem formé par le pape Jean Paul II (de 1978 à 2005) et le cardinal Ratzinger (qui lui succéda), appuyé par les pouvoirs conservateurs occidentaux, qui a condamné et rétrogradé plusieurs théologiens de la libération pour leur engagement politique comme le prêtres ministres nicaraguayens en 1983, à qui s’ajoutèrent Leonardo Boff en 1985 et Jon Sobrino en 2007. Mais cette opposition à la théologie de la libération n’avait rien de noble, car elle favorisait la lutte des classes et pouvait rebuter les fidèles de secteurs plus aisés (https://www.lavie.fr/christianisme/eglise/le-pape-franccedilois-est-il-un-theacuteologien-de-la-libeacuteration-30349.php, https://www.lepoint.fr/societe/la-theologie-de-la-liberation-de-nouveau-en-odeur-de-saintete-19-07-2013-1706397_23.php, et https://www.monde-diplomatique.fr/2017/10/LOMBARD/58034).
Je ne me sens nullement proche de mouvements comme les Éveilleurs, une association née sous le giron de la Manif pour tous, de Jean-Frédéric Poisson, dirigeant de VIA - la voie du peuple (ex-Parti chrétien-démocrate), de Laurence Trochu, présidente du Mouvement conservateur (anciennement Sens commun), et de la bourgeoisie catholique qui sont allés vers Zemmour, dont l’homme qui assure sa sécurité, Albéric Dumont, porte-parole officiel de la Manif pour tous, car il défend les valeurs familiales conservatrices et souhaitent qu’il reviennent sur l’ouverture de la PMA, qui profite d’un électorat orphelin de François Fillon, candidat malheureux à la présidentielle de 2017, en insistant sur le conservatisme sociétal (droit à l’avortement, place des femmes et des minorités, droits LGBT…), l’Islam et l’immigration (https://www.lavie.fr/actualite/societe/mais-qui-sont-ces-catholiques-qui-suivent-eric-zemmour-78654.php). Catholique de gauche, je ne suis pas convaincu par Christiane Taubira qui se pose comme la figure providentielle du rassemblement sans pour autant proposer de mesures qui la démarquent, surtout qu’elle arrive beaucoup trop tard pour convaincre. Mais, Jean-Luc Mélenchon, Yannick Jadot, ou Anne Hidalgo n’acceptent pas de la suivre, car les autres candidats, peuvent répondre à l’un des enjeux, mais pas à leur ensemble. Anne Hidalgo s’est emparée de la justice et juge elle a la "capacité de rassembler une majorité de Français" pour permettre de conduire la gauche "au pouvoir et au gouvernement" (https://www.bfmtv.com/politique/elections/presidentielle/je-suis-cette-gauche-la-hidalgo-repond-a-royal-sur-le-vote-utile-pour-la-presidentielle_AD-202202200054.html), mais une partie de ses électeurs soutient le président sortant, l’autre penche vers la radicalité, Yannick Jadot du progrès pour les communs, prétend porter les couleurs d’une écologie de gouvernement en lieu et place d’une social-démocratie en perdition, mais son assise est trop faible pour prétendre l’emporter, et il a tenté de convaincre le vendredi 18 février à Tours une centaine de militants, sympathisants et curieux, qu'il est le seul candidat à pouvoir répondre aux enjeux actuels que Nucléaire, pouvoir d'achat, logement, inégalités ou alimentation bio (https://www.francebleu.fr/infos/politique/en-meeting-a-tours-le-candidat-des-verts-yannick-jadot-veut-convaincre-au-dela-de-l-ecologie-1645233055), Jean-Luc Mélenchon de la lutte contre les inégalités, mais sa détestation des socialistes, combinée à son comportement erratique, l’empêche d’être l’homme du rassemblement, même s’il est en tête à gauche selon les sondages ne veut pas appeler Hidalgo et Taubira pour leur demander leur retrait (https://www.bfmtv.com/politique/elections/presidentielle/en-direct-melenchon-macron-pecresse-le-pen-zemmour-suivez-l-actualite-de-la-presidentielle_LN-202202170078.html), et le but de la Primaire populaire était justement de réunir autour d’un programme commun et non d’une personnalité, mais Taubira se pose en femme providentielle sans avoir vraiment de propositions de fond, ni d’équipe, de structure, et seuls 86 élus ont d’ores et déjà envoyé leurs parrainages en sa faveur, et le candidat communiste Fabien Roussel gagne en popularité ces dernières semaines, car il s’appuie sur ses déclarations à répétition concernant la "gastronomie française", "le bon vin", "la bonne viande" (https://www.franceinter.fr/politique/presidentielle-le-candidat-communiste-fabien-roussel-a-t-il-ete-un-assistant-parlementaire-fantome, et https://www.nouvelobs.com/politique/20220220.OBS54726/christiane-taubira-un-petit-tour-et-puis-s-en-va.html). Cela s’explique par le fait que la gauche refuse de faire le bilan du quinquennat Hollande pour pouvoir prétendre conduire un équipage solide pour un rassemblement. Sa crédibilité a été sérieusement écornée entre 2012 et 2017, car la gauche au pouvoir est passé d’un simple réalisme, relayé par les réformes «sociétales» mais amputé de l'inventivité sociale (https://www.lavie.fr/actualite/societe/comment-expliquer-la-desaffection-des-chretiens-de-gauche-envers-christiane-taubira-80478.php, https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/01/31/apres-la-primaire-populaire-la-gauche-dans-l-impasse_6111681_3232.html, et https://www.liberation.fr/debats/2018/09/04/pierre-rosanvallon-le-grand-recit-de-la-gauche_1676549/).
Je regarde avec tristesse ce PS déboussolé à travers Ségolène Royal qui a brisé un tabou en affirmant que «le vote utile à gauche, c'est Jean-Luc Mélenchon», mais c’est n’est pas un bon guide politique puisqu’elle disait qu'elle pourrait soutenir (la candidate LR) Valérie Pécresse, il y a cinq ans elle a soutenu dès le premier tour Emmanuel Macron, il y a trois ans elle voulait conduire une liste aux européennes avec (le candidat écologiste) Yannick Jadot (https://www.france24.com/fr/france/20220217-pr%C3%A9sidentielle-le-vote-utile-%C3%A0-gauche-c-est-m%C3%A9lenchon-affirme-s%C3%A9gol%C3%A8ne-royal), et ses membre à la droite du PS qui se rallient à Emmanuel Macron comme Eduardo Rihan Cypel, Marisol Touraine et Elisabeth Guigou (https://www.huffingtonpost.fr/entry/presidentielle-2022-marisol-touraine-rallie-emmanuel-macron_fr_62112f9ee4b0f2c343f52616) qui s’accommodent volontiers des sorties du président de la République sur «ceux qui ne sont rien» ou le « pognon de dingue » dépensé dans les minima sociaux et la suppression de l’ISF, ordonnances travail, réforme de l’assurance chômage, ou encore loi sécurité globale ne les ont pas échaudé (https://www.marianne.net/politique/gauche/touraine-rebsamen-guigou-bartolone-la-jambe-gauche-claquee-de-la-macronie). Ce qui pousse la présidente socialiste de la Région Occitanie et soutien d'Anne Hidalgo, Carole Delga, a se désoler du «bal des opportunistes» qui rythme la campagne présidentielle et appelle la France à «redevenir le pays des idées et non celui de cette mauvaise télé-réalité» (https://www.lejdd.fr/Politique/presidentielle-la-ps-carole-delga-deplore-un-debat-escamote-par-les-ralliements-opportunistes-4094790). Tandis que Place publique, co-fondé par l’eurodéputé Raphaël Glucksmann, ne soutiendra aucun candidat de gauche à la présidentielle, position prise après un vote interne (https://www.sudouest.fr/elections/presidentielle/presidentielle-le-mouvement-de-raphael-glucksmann-place-publique-ne-soutiendra-aucun-candidat-8972844.php). Cependant, le ministre des Affaires étrangères et ex-responsable socialiste Jean-Yves Le Drian va un peu trop vite en estimant le vendredi 18 février que le PS était moribond et proche de «l'enterrement» (https://www.lefigaro.fr/politique/le-ps-plus-pres-de-l-enterrement-que-de-la-resurrection-selon-jean-yves-le-drian-20220218), et si son aile droite rejoint Emmanuel Macron, cela lui permettra une réelle rénovation comme en 1971 quand la vieille SFIO de Guy Mollet, mouillée dans les affres de la guerre d'Algérie, s'est résignée à sa propre rénovation à tâtons et changée en Nouveau Parti socialiste (NPS), dirigé par Alain Savary, mais le souvenir du molletisme plombait l'essor de la maison rénovée des socialistes, et il a fallu un vrai renouveau du P.S. avec l’arrivée de François Mitterrand à sa tête, favorable à «l’union de la gauche» avec le puissant Parti communiste, en prend le contrôle grâce au ralliement de l’aile gauche menée par Jean-Pierre Chevènement et à l’appui des barons fédéraux, le marseillais Gaston Defferre et le lillois Pierre Mauroy (https://www.la-croix.com/Actualite/France/D-Epinay-a-Reims-les-grandes-heures-des-congres-socialistes-2015-06-06-1320517), comme semble le prévoir des socialistes, dont Jean-Christophe Cambadélis, qui se sont réunis le samedi 29 janvier à Saint-Ouen, non pas pour interférer sur la présidentielle mais pour commencer un travail de réflexion pour la suite. Un travail qui, regrettent-ils, n’a pas été mené par la direction actuelle (https://www.leparisien.fr/politique/au-ps-le-pole-socio-democrate-prepare-deja-lapres-presidentielle-28-01-2022-64UYBJDHTZGGFBKSS3GNPJQKEY.php).
Et il est dommage pour moi qu’est finie cette une époque où le Vatican admet, pour la première fois, que le socialisme est compatible avec la foi chrétienne (Lettre de Paul VI au cardinal Roy en 1971). Où les évêques français, en 1972, reconnaissent la légitimité du pluralisme politique et électoral de leurs fidèles. Où des régions de forte tradition chrétienne (Bretagne, Massif central, sud de l’Alsace) basculent à gauche. Où la «main tendue» aux chrétiens par le parti communiste ou la CGT trouve du répondant. Où prospèrent des «communautés chrétiennes de base», insoumises à la hiérarchie, ou des journaux (Témoignage chrétien, La Vie) défendant des options progressistes, tiers-mondistes, anticapitalistes ou des «théologiens de la libération» en Amérique latine. Pour eux, le combat pour une gauche sociale et politique non marxiste ne se différencie pas de la lutte menée à l’intérieur de l’Église pour son adaptation à la société moderne et son engagement auprès des plus défavorisés. Dans son livre-référence, La Crise catholique (Payot, 2002), l’historien Denis Pelletier décrit et souligne la contribution spécifique des chrétiens à «cette nébuleuse qui va alors de la gauche au gauchisme», pour qui «Marx voisine avec l’Évangile» et «la Révolution se joue tout à la fois dans l’Église et dans la société» (http://www.slate.fr/story/120715/michel-rocard-chretiens-de-gauche). Finalement, les évêques de France n’ont plus le courage d’appeler à voter contre l’extrême droite comme au second tour de la présidentielle comme en 2002, ou à voter contre Zemmour et Marine Le Pen actuellement. Ceux-ci sont depuis longtemps choisis dans les rangs conservateurs qui ont appuyé la centralisation romaine menée par Jean-Paul II et Benoît XVI dans laquelle l'inégalité de pouvoir entre femmes et hommes perdure, les signes extérieurs "rétro", l'apparat et un fonctionnement digne d'une monarchie absolue dominent encore, tout comme le rigorisme, en matière de morale sexuelle et conjugale, et de bioéthique, et se détournent des cathos de gauche qui souhaitaient rapprocher l'Église et le monde (https://www.telerama.fr/idees/cathos-de-gauche-la-messe-est-dite,86822.php). Et les cathos de gauche se retrouvent dans le pape François dans sa critique sans relâche le capitalisme contemporain, sur le fait qu’il est l’un des défenseurs de l’environnement les plus en vue au monde, que sur la question des homosexuels, sa formule «Qui suis-je pour juger?» est devenue «culte», qu’il a en outre vivement critiqué Donald Trump pour son projet de mur frontalier, qualifiant les politiques d’immigration de l’ancien président de «cruelles», entamé une rupture avec ses prédécesseurs en révisant l’enseignement de l’Eglise sur la peine capitale, rappelant qu’elle est «une attaque inadmissible contre l’inviolabilité et la dignité de la personne», et il a de plus clairement indiqué qu’il soutenait les soins de santé universels, il a aussi ouvert la porte à une accession des femmes au diaconat, et au début de son pontificat, il déclara que les catholiques ne pouvaient pas «insister uniquement sur les questions liées à l’avortement, au mariage gay et à l’utilisation de méthodes contraceptives», mais nous ne sommes pas naïf car nous savons que le pape est farouchement opposé aux études de genre et la chirurgie de réassignation sexuelle, a réaffirmé l’enseignement du pape Jean Paul II selon lequel l’Église n’a pas l’autorité d’ordonner des femmes, et il a maintenu dans ses encycliques que les hommes et les femmes ont des rôles et des caractéristiques distincts, et sous son pontificat, la Congrégation pour la doctrine de la foi a en outre décrété que les prêtres ne pouvaient pas bénir les couples de même sexe (https://www.cath.ch/newsf/le-pape-francois-nest-pas-un-progressiste-ni-un-conservateur/).
Cependant, c’est la meilleure période pour les cathos de gauche comme nous, et plutôt que d’aller vers Emmanuel Macron, dont l’historien Pierre Serna dans son essai incisif L'extrême centre ou le poison français. 1789-2019 montre qu’il s'inscrit selon lui parfaitement dans ce qu'il appelle un «poison», celui de «l'extrême centre»: «Flexible, prétendu modéré mais implacable qui vide de sa substance démocratique la République en la faisant irrémédiablement basculer vers la république autoritaire.», ce que semble démontrer le fait que député La République en marche (LRM), et le vice-président de l’Assemblée nationale, Hugues Ranson a mis en avant «ses doutes» et a annoncé, mercredi 16 février 2022, ne pas vouloir se représenter lors des prochaines législatives, mettant en avant ses critiques face au projet de la majorité comme sur le rôle du Parlement (https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/02/17/legislatives-hugues-renson-figure-lrm-de-l-assemblee-ne-se-represente-pas-mettant-en-avant-ses-doutes_6114046_823448.html), il serait donc grand temps de refonder la gauche sur ce qu’elle est vraiment une rupture politique, car comme l’avait dit Mitterrand au congrès d'Epinay de 1971, qui allait sceller son hégémonie sur le PS et l'Union de la gauche : "Celui qui n'accepte pas la rupture avec l'ordre établi, avec la société capitaliste. Celui-là, je le dis, ne peut pas être adhérent du Parti socialiste" (https://www.franceculture.fr/politique/quand-mitterrand-disait-celui-qui-naccepte-pas-la-rupture-avec-la-societe-capitaliste-ne). Cette gauche devrait arrêter de suivre la droite et l’extrême droite, et doit être comme dans les années 1980 au diapason des mouvements de la société, dans des grandes mobilisations populaires, dans des lieux symboliques de la capitale, et appuyer une série de réformes qui changeront profondément le visage de la France comme entre 1981 et 1982 comme l’abolition de la peine de mort, retraite à 60 ans, la hausse du smic, la cinquième semaine de congés payés, la création de l’impôt sur la fortune, la dépénalisation de l’homosexualité, nationalisation des grandes entreprises publiques stratégiques, ou la libération des ondes de la radio et de la télévision (https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/c-est-tout-com/la-disparition-un-documentaire-sur-la-chute-du-ps-en-pleine-campagne-presidentielle_4917255.html, et https://www.ladepeche.fr/2021/05/10/le-ps-32-et-lesprit-de-mai-1981-9536026.php), et c’est aussi aux cathos de gauche qui s'identifient aisément à la social-démocratie, et qui «préfèrent généralement l'absence de hiérarchie au profit de l'horizontalisation des relations, sans classement de valeur sur l'échelle sociale, et défendent les minorités. Selon eux, personne n'est supérieur à personne. L'essentiel est de lutter contre des inégalités socialement injustes» de devoir bouger les lignes pour que la gauche retrouve ses couleurs comme dans les années 1970 et 1980 (http://www.slate.fr/story/223383/vote-catholique-election-presidentielle-2022-macro-pecresse-zemmour-lepen).
Et ils devraient proposer un monde sans pauvreté comme le souhaite l'historien et journaliste Rutger Bregman qui affirme dans Utopies réalistes que l'instauration d'un revenu minimum garanti, avec lequel les gens dont le travail est nécessaire à la société - les infirmières, les enseignants, les éboueurs, etc. - disposeraient de suffisamment d'argent pour faire la grève et améliorer leurs conditions de travail, d'une semaine de travail de 15 heures viendrait à bout des inégalités dans le monde, car travailler moins réduirait plusieurs problèmes de société - stress, pollution, inégalités hommes-femmes, chômage, etc. - et permettrait de consacrer plus de temps aux aspects de nos vies qui comptent le plus à nos yeux : la famille, les loisirs, etc., opter pour la redistribution qui est le meilleur moyen de prémunir la société contemporaine contre la croissance des inégalités que promettent les avancements technologiques, et remplacer le PIB par plusieurs outils de rechange comme le Happy Planet Index, indice qui tient compte du bien-être, de l'espérance de vie, des inégalités de revenus et des empreintes écologiques d'une société (https://www.lapresse.ca/arts/livres/biographies-recits-essais/201710/13/01-5139968-rutger-bregman-pour-en-finir-avec-la-pauvrete.php), ou encore proposer comme Joseph Stiglitz de prôner une meilleure régulation de la mondialisation (https://www.economie.gouv.fr/facileco/joseph-stiglitz#) et Paul Krugman d’appeler à une hausse de la fiscalité et à un surcroît d’interventionnisme publique, les États à accompagner la mondialisation, et être en faveur de l’instauration d’une sécurité sociale pour tous (https://www.economie.gouv.fr/facileco/paul-krugman), et appuyer une réforme constitutionnelle comme celle de 2015 avec le rapport Refaire la démocratie de Claude Bartolone et Michel Winock qui voulait moderniser la Ve République en sortant le président de la République du rôle ambigu que lui avait conféré Charles de Gaulle en rendant au le président de la République son rôle d’arbitre et de garant, en passant au septennat non renouvelable soit, à défaut, de conserver le quinquennat tout en organisant les élections législatives avant l’élection présidentielle, cette inversion aurait pour effet de donner la prééminence aux élections législatives sur la présidentielle, donc au premier ministre sur le président de la République, en rénovant le Parlement, avec une réduction du nombre de parlementaires : 400 députés (contre 577 actuellement) et 200 sénateurs (contre 348), en accordant en faveur de l’élection «de la moitié au moins des députés à la proportionnelle», selon plusieurs modalités possibles, auxquels s’joute une fusion du Sénat avec le Conseil économique et social qui est une idée que Charles de Gaulle avait proposée, la question de donner les mêmes pouvoirs à des élus politiques et à des élus sociaux, d’améliorer la fabrique de la loi ou les instruments de contrôle et les droits de l’opposition, pour lesquels serait notamment nommé un contre-rapporteur d’oppositio», au côté du rapporteur principal, qui serait amené non pas à faire de l’obstruction mais à développer un point de vue différent qui enrichirait les débat», l’extension du champ du référendum à toutes les matières législatives, et plus seulement aux réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation, c’est également le cas de la volonté de créer un véritable référendum d’initiative populaire» et l’institution d’un véritable pouvoir judiciaire indépendant de l’exécutif (https://www.la-croix.com/Actualite/France/Des-propositions-pour-refaire-la-democratie-2015-10-02-1363908).
Pendant ce temps, à gauche où la condamnation de l’invasion russe de l’Ukraine est totale, et qui reste malgré tout partagée sur la réponse à apporter, on observe des mouvements (https://www.parismatch.com/Actu/Politique/Sondage-de-la-presidentielle-Pecresse-au-plus-bas-ca-bouge-a-gauche-1790234). Jean-Luc Mélenchon (11%, -0,5) qui se voit attaqué par les responsables écologistes et socialistes sur ses positions quand à la crise ukrainienne (https://basta.media/Ukraine-guerre-offensive-russe-Poutine-reaction-candidats-de-gauche-risque-nucleaire), souhaite que soit obtenu un «cessez-le-feu», le départ de l’armée russe et la réunion d’une conférence de l’OSCE (https://www.ouest-france.fr/monde/guerre-en-ukraine/j-ai-toujours-dit-que-si-on-menacait-la-russie-elle-passerait-les-frontieres-declare-melenchon-119be9f0-961c-11ec-8a8c-4c622ba3ed85), et Yannick Jadot (5%), -0,5), qui en appelle à des sanctions contre les responsables russes et même à des livraisons d’armes à l’Ukraine (https://basta.media/Ukraine-guerre-offensive-russe-Poutine-reaction-candidats-de-gauche-risque-nucleaire), sont à la baisse, quand Anne Hidalgo qui en réaction aux frappes russes sur l’Ukraine jeudi, qui auraient fait 137 morts et 316 blessés côté ukrainien selon un premier bilan des autorités, l’Europe et les États-Unis ont adopté dans la soirée des sanctions économiques contre la Russie, mais la maire de Paris veut aller plus loin en fournissant “des armes à l’Ukraine, pour qu’ils se défendent” (https://www.francebleu.fr/infos/international/guerre-en-ukraine-anne-hidalgo-en-faveur-de-fournir-des-armes-a-l-armee-ukrainienne-1645774862), et Christiane Taubira qui en appelle à la «solidarité avec l’Ukraine et avec le peuple ukrainien» (https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/live/2022/02/24/christiane-taubira-yannick-jadot-et-anne-hidalgo-presents-au-rassemblement-contre-la-guerre-en-ukraine_6115028_6059010.html), progressent même si les intentions de vote restent modestes (2,5%, +0,5). Fabien Roussel reste lui stable à 4,5% et n'accuse plus qu'un demi-point de retard sur le candidat écologiste, s’est de son côté opposé à toute livraison d’armes condamnant l’attitude du président russe, mais il s’en prend aussi aux États-Unis (https://basta.media/Ukraine-guerre-offensive-russe-Poutine-reaction-candidats-de-gauche-risque-nucleaire).
Ces vingt dernières années, le capitalisme a enchaîné les crises, des marées humaines ont réclamé que leurs dirigeants «dégagent», sans que l’ordre néolibéral en place soit sérieusement ébranlé pour autant. Et c’est l’extrême droite qui progresse. Les erreurs et les reniements de la gauche au pouvoir, en particulier en Europe, expliquent qu’elle n’ait tiré aucun bénéfice du mécontentement général (https://www.monde-diplomatique.fr/2022/01/BREVILLE/64204), comme on peut le voir ici en France. Ne pouvant rien attendre pour 2022. Je souhaite qu’en 2027, on ait le droit un candidat qui unira la gauche, comme au Chili avec Gabriel Boric, ancien syndicaliste étudiant, défenseur de la justice sociale et de l'État-providence, âgé de 35 ans, qui a consacré son mandat à la défense des droits de l'homme, à la lutte contre les conflits d'intérêts et à la réduction des indemnités parlementaires, tout en se faisant se fait l'artisan de la réécriture de la Constitution chilienne en 2019, qui une fois élu avec 56% des voix face à son rival d'extrême droite, José Antonio Kast, sous la bannière de la coalition Apruebo Dignidad ("J'approuve la dignité" en français), un rassemblement très large des partis et mouvements de gauche, et appauyé par les anciens leaders étudiants de la Révolution démocratique, la gauche aussi bien libertaire que chrétienne, mais aussi le Parti communiste chilien, les écologistes de la Fédération régionaliste verte et sociale (Frevs) ou encore des figures de centre gauche, comme l'ancienne présidente Michelle Bachelet, a dévoilé vendredi 21 janvier 2022 son gouvernement, marqué par une forte pluralité politique, avec la nomination d'un représentant de la gauche modérée aux Finances et une majorité de femmes dont une climatologue à l'environnement et la petite-fille de Salvador Allende, Maya Fernández Allende, à la Défense. Il souhaite la création d'un système de santé universel ainsi que la mise en place d'un régime public pour les retraites, afin de remplacer le système actuel de capitalisation privée. Pour financer ces futurs services publics, Gabriel Boric entend augmenter les impôts sur les grandes fortunes. Outre le développement d'un État-providence, Gabriel Boric défend des réformes sociétales, en lien avec les luttes féministes très vives au Chili, et le mariage des couples homosexuels, qui sera autorisé dans le pays à partir du 10 mars 2022 (https://www.francetvinfo.fr/monde/ameriques/presidentielle-au-chili/chili-quatre-choses-a-savoir-sur-gabriel-boric-le-candidat-de-gauche-elu-president_4887767.html, et https://www.francetvinfo.fr/monde/ameriques/presidentielle-au-chili/au-chili-boric-devoile-un-gouvernement-pluriel-jeune-et-majoritairement-feminin_4925981.html).
Merci !