Publié le 7 Avril 2023
Vinciane Joly dans la-croix.com nous montre que le pape présidera à Rome l’office de la Passion, vendredi 7 avril 2023, mais n’assistera finalement pas au chemin de croix, «en raison du froid intense de ces derniers jours». Le Vatican n’a pas, cette année, publié à l’avance les méditations qui seront lues pendant le chemin de croix. Cette célébration est centrale pour les catholiques qui y commémorent en 14 stations les étapes conduisant le Christ de sa condamnation à mort à sa mise au tombeau. Ces dernières années, les méditations ont par exemple été confiées à des communautés religieuses, des écoliers ou des prisonniers.
Juan José Tamayo nous montre aussi dans religiondigital.org (https://www.religiondigital.org/opinion/Jesus-nazaret-tamayo-viernes-santo-cruz_0_2548545139.html) que la mort de Jésus de Nazareth n'était pas la volonté de Dieu, mais une conséquence de son existence libre et de sa façon d'agir libératrice, de son attitude transgressive et de son conflit permanent avec les autorités religieuses et politiques, bref, de sa confrontation avec l'Empire romain et ses représentants dans la Palestine de son temps. Le peuple juif n'a pas non plus porté la responsabilité de sa condamnation et de son exécution ultérieure. Celui qui a rendu la sentence condamnatoire contre Jésus et a donné l'ordre de l'exécuter était Ponce Pilate, la plus haute autorité judiciaire de l'Empire romain dans la province de Judée. Mais cette attitude disculpatoire de Pilate de la part de certains récits de la passion était due, selon Paul Winter, un prestigieux chercheur juif du procès de Jésus, au fait qu'ils s'adressaient plus aux non-juifs qu'aux juifs, surtout les Romains, qui détenaient le pouvoir politicien d'Israël/Palestine, alors une colonie romaine. Avec cela, peut-être entendaient-ils surmonter l'opposition de l'Empire envers le christianisme et montrer la possibilité de rencontrer les institutions impériales. Cette tendance anti-juive s'est radicalisée dans l'histoire du christianisme au point d'accuser les juifs de «déicides», ce qui constitue l'un des fondements de l'antisémitisme.
Une telle image de Pilate est cependant démentie par les historiens. Pilate n'était pas une personne douteuse, bien au contraire : C'était un dirigeant dur et impitoyable, inflexible et obstiné, violent et cruel, répressif et dépravé, arbitraire et insolent. Philon d'Alexandrie, un philosophe juif hellénistique contemporain de Jésus, le considère comme un véritable tyran, qui n'a pas respecté la loi dans les procédures judiciaires. Flavius Josèphe, un historien judéo-romain, rappelle la répression sanglante de Pilate contre les Juifs qui s'opposaient à l'utilisation du trésor sacré pour la construction d'un aqueduc qui conduirait l'eau à Jérusalem. Selon le bibliste allemand Jürgen Roloff, en condamnant Jésus à mort, Pilate en a profité pour calmer, par un acte d'intimidation, la tension qui régnait à Jérusalem à Pâques. Il paraît très douteux que les autorités juives aient prononcé un jugement de condamnation contre Jésus, puisque, selon Simon Légasse, auteur d'une des études les plus solides sur le sujet, «le récit qui en fait mention (Mc 14,14; en paire avec Mt 26,66), est […] une excroissance d'origine chrétienne élaborée à partir d'une condamnation informelle dans la résidence d'Anne, qui personnellement n'avait aucun pouvoir judiciaire».
Jésus a été condamné à mort par Pilate, et les raisons de la condamnation étaient politiques et non religieuses. Il n'a pas été reconnu coupable de blasphème, puisque l'Empire romain n'est pas entré dans des dissertations théologiques au sein du judaïsme. Il a été condamné pour avoir mis en danger l'ordre public impérial, pour être un séditieux, un subversif, comme Jean-Baptiste et de nombreux révolutionnaires juifs qui ont lutté contre l'occupation romaine de la Palestine/Israël. Ceci est confirmé par l'historien romain Tacite qui, racontant la persécution des chrétiens sous Néron, affirme que le nom "chrétiens" "vient du Christ, qui, sous la principauté de Tibère, avait été livré à la torture par le procurateur Ponce Pilate". Hegel lui-même souligne le côté politique de la mort de Jésus de Nazareth et montre que la honte, le déshonneur et la bassesse auxquels est soumise la personne tuée sur la croix deviennent déshonneur civil et honte universelle. À son tour, il considère que le plus bas, ce que l'État a déterminé comme le plus déshonorant, a été renversé et est devenu l'honneur suprême.
Un autre fait indiscutable sur la responsabilité de l'autorité romaine dans la mort de Jésus et sa motivation politique est la forme d'exécution : la crucifixion, une torture que Rome appliquait au peuple séditieux de ses colonies et aux esclaves rebelles. Il semble prouvé que les crucifixions pratiquées en Palestine depuis l'époque des procurateurs romains jusqu'à la guerre des Juifs ont eu lieu pour des raisons politiques. Avec sa prédication sur le Royaume de Dieu, Jésus jugeait et condamnait l'ordre impérial romain. Avec son refus de reconnaître l'autorité politique d'Hérode Antipas, gouverneur de Galilée, et son mépris pour lui, il manifeste son anti-impérialisme. Bref, Jésus de Nazareth a été condamné pour avoir altéré la Pax romana, pour être un ennemi de l'Empire et, selon la logique impérialiste, un ennemi de l'Humanité.
Pedro Casaldáliga, théologien, prophète, mystique et évêque du Mato Grosso (Brésil), était l'un des plus ardents défenseurs et militants d'un christianisme anti-impérial, avec sa proposition de l'utopie du Royaume de Dieu comme alternative à l'Empire, à n'importe quel empire, passé présent et futur. Cela est évident dans ce texte de sa paternité : «Chrétiennement parlant, le mot d'ordre est très clair (et très exigeant), et Jésus de Nazareth nous l'a donné : contre la politique oppressive de tout empire, la politique libératrice du Royaume. Ce Royaume du Dieu vivant, qui appartient aux pauvres et à tous ceux qui ont faim et soif de justice. Contre "l'agenda" de l'empire, l'agenda du Royaume.»
Le pape François célébrera samedi soir la résurrection du Christ lors de la vigile pascale en la basilique Saint-Pierre. Lors de cette veillée, le cierge pascal, symbole de la présence du Christ, est alors allumé et brillera jusqu’à la Pentecôte. C’est aussi durant la Vigile pascale que sont célébrés les baptêmes d’adultes. L’année dernière, le pape avait baptisé sept catéchumènes. Dimanche de Pâques, il présidera la messe place Saint-Pierre. À l’issue de la célébration, à midi, le pape prononcera la traditionnelle bénédiction urbi et orbi (sur la ville - de Rome - et sur le monde) depuis la loggia centrale de la basilique Saint-Pierre avant de donner l’indulgence plénière.
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